Les mesures de protection d’un majeur

Lorsque les facultés de décision d’une personne majeure sont altérées, on parle d’une personne vulnérable. Cette personne peut bénéficier d’une mesure de protection, qui, comme son nom l’indique, est destinée à assurer sa protection. Il existe 4 mesures de protection juridique et 1 mandat de protection future. Il est important d’en tenir compte dans les soins proposés à la personne, notamment en ESSMS, tout comme il est important que la personne garde son autodétermination et sa capacité de choix.

4 niveaux de protection juridique

Depuis le 1er janvier 2020, le juge des contentieux de la protection a fait son apparition au sein des tribunaux français et remplace le juge des tutelles qui depuis, n’existe plus. Cette nouvelle appellation est issue de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. L’usage favorise toujours l’emploi du terme Juge des tutelles

Du plus léger au plus impliquant, il existe 4 niveaux de protection juridique décidées par le juge des tutelles :

  • la sauvegarde de justice : permet de contrôler a posteriori les actes de la personne concernant son patrimoine.
    • souple
    • de courte durée : 1 an, renouvelable une fois
    • immédiat
    • autonome temporaire ou conservatoire (dans l’attente d’une tutelle ou curatelle)
    • missions précises indiquées par le juge des contentieux de la protection
  • l’habilitation familiale (spéciale ou générale) : concerne les actes d’administration ou de disposition. Cette mesure n’englobe pas les actes de disposition à titre gratuit, du type donation. Dans ce cas, l’autorisation du juge est toujours nécessaire.
    • simple
    • accordée à un membre de la famille dans le cas d’un contexte familial serein
  • la curatelle simple : mesure d’assistance permettant de protéger les biens du majeur et/ou sa personne. Cette mesure laisse une autonomie à la personne. Le curateur peut l’assister dans les décisions à prendre, mais ce n’est pas obligatoire car la personne réalise elle-même les actes de la vie courante.
    • contrôle des dépenses et protection des biens / du patrimoine
    • la personne a le droit de gérer elle-même ses comptes bancaires
    • assistance du curateur pour tous les actes dits de disposition : acheter ou vendre un bien immobilier, souscrire un emprunt, faire une donation
    • un curateur désigné
    • curatelle initiale : jusqu’à 5 ans
    • une mainlevée de la mesure peut être demandée avant l’échéance initiale
    • un prolongement de la mesure peut être décidé par le juge
    • souple
  • la curatelle renforcée : mesure d’assistance permettant de protéger les biens du majeur et/ou sa personne, lorsque celui-ci a perdu son autonomie dans la gestion des actes de la vie courante. Le curateur l’assiste dans les décisions à prendre.
    • contrôle des dépenses et protection des biens / du patrimoine par le curateur et il rend des comptes sur sa gestion une fois par an au juge des contentieux de la protection
    • un curateur désigné
    • le curateur perçoit les ressources de la personne sur le compte bancaire et règle les dépenses
    • curatelle initiale : jusqu’à 5 ans
    • une mainlevée de la mesure peut être demandée avant l’échéance initiale
    • un prolongement de la mesure peut être décidé par le juge
  • la tutelle : mesure de représentation et protection complète des biens et de la personne. Un tuteur est désigné.
    • contraignant
    • tutelle initiale : jusqu’à 10 ans
    • une mainlevée de la mesure peut être demandée avant l’échéance initiale
    • un prolongement de la mesure peut être décidé par le juge

Il existe également une mesure juridique complémentaire :

  • le mandat de protection future : il s’agit d’une protection sur mesure et anticipée des bien et de la personne du majeur en relation avec sa santé. Cette mesure prévaut sur les 4 protections précédentes.

Santé et social

Dans le domaine de la santé et du social, il existe deux mesures provisoires qui peuvent être délivrées ponctuellement :

  • la mesure d’accompagnement social personnalisé (MASP) : les capacités du majeur ne sont pas altérées mais la personne peut être en grande difficulté sociale et bénéficier ainsi d’un accompagnement social individualisé (aide à la gestion des prestations sociales par exemple). L’accord de la personne est nécessaire.
  • la sauvegarde de justice médicale : un, voire deux médecins, suggèrent au Procureur de la République, le placement sous sauvegarde de justice de la personne afin de la protéger des actes consentis de façon contraire à ses intérêts. Cette mesure peut également être suggérée au(x) médecin(s) par des tiers. Durée d’un an, renouvelable une fois.

Consentement préalable

Le cadre juridique étant posé, abordons maintenant l’information auprès de la personne. Le code de la santé, article L 1111-2, déclare : « Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé », y compris lorsqu’elle est en mesure de protection.

L’article 429 du code civil précise : « La mesure de protection judiciaire peut être ouverte pour un mineur émancipé comme pour un majeur. »

La personne a donc le droit de participer à la prise de décision la concernant et le protecteur doit donc s’assurer que la personne est consentante et comprend les enjeux de l’acte médical qui la vise.

Autonomie graduée

Le consentement de la personne doit systématiquement être recherché, même lorsque la personne est en tutelle. C’est ainsi qu’elle choisit seule les décisions qui la concernent, dans la mesure où son état de santé le permet. Elle peut donc refuser des soins médicaux et c’est son avis qui prime sur l’avis de sa tutelle.

L’autonomie est graduée, c’est ce qu’on appelle le régime de l’autonomie graduée (réforme du 23 mars 2019) :

  1. présomption de capacité : quel que soit le régime de protection, la personne est supposée pouvoir prendre les décisions qui la concerne.
  2. tutelle aux biens et à la personne avec mission d’assistance à la personne : si l’état du majeur protégé ne lui permet pas de prendre une décision éclairée, il peut bénéficier de l’assistance d’une personne chargée de sa protection.
  3. tutelle aux biens et à la personne avec mission de représentation : si l’état de la personne nécessite plus qu’une assistance, la personne sera alors représentée pour tous ses actes.

Important : Si le jugement ne mentionne que protection des biens et de la personne, le protecteur n’a aucun pouvoir pour représenter la personne puisqu’en l’absence de précision, le majeur protégé est présumé prendre seul les décisions qui le concernent.

En cas de désaccord entre le protecteur et le protégé

  • le juge désigne celui qui pourra prendre la décision entre les deux, mais ne prend pas position sur le sujet de désaccord en lui-même.
  • sauf urgence, l’autorisation du juge est nécessaire pour des actes portant gravement atteinte à l’intimité de la vie privée de la personne protégée (amputation, intrusion au domicile, etc.)

Cas particuliers

Certains actes ou situations particulières relèvent d’un système spécifique :

  • les actes relevant de choix strictement personnels (la contraception, la PMA, l’IVG par exemple) dépendent uniquement de la volonté de la personne protégée
  • les actes comme le don de sang et le don d’organes de son vivant sont interdits
  • en cas d’urgence vitale, le médecin doit soigner son patient même si le protecteur ne peut être joint.

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Sources :

Crédits :

  • Rédaction : Lucille Blondé
  • Relecture : Yann Rondot

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